L’Arabie saoudite a condamné une femme à 34 ans de prison pour son activité sur Twitter. C’est la plus longue peine saoudienne jamais infligée à un militant pacifique. Salma al-Shehab est une Saoudienne de 34 ans, épouse et mère de deux enfants. Elle a été condamnée à six ans de prison pour le “crime” d’avoir utilisé un site Internet pour “provoquer des troubles publics et déstabiliser la sécurité civile et nationale”. Sa peine a finalement été revue à 34 ans. Une militante pacifique Selon l’organisation indépendante de défense des droits de l’homme ALQST, la femme a été arrêtée en janvier 2021 et a été soumise à des séances d’interrogatoire pendant 265 jours avant d’être déférée devant le tribunal pénal spécialisé. Ce lundi, une cour d’appel requiert une nouvelle peine à son encontre. À savoir, 34 ans de prison suivis d’une interdiction de voyager pendant 34 ans. Le procureur général a demandé à la cour de prendre en considération d’autres crimes présumés. Communiqué ALQST. Sur Instagram, Salma al-Shehab se décrivait auprès de ses 159 abonnés comme une hygiéniste dentaire, une éducatrice médicale, une doctorante à l’université de Leeds au Royaume-Uni et une conférencière à l’université Princesse Nourah bint Abdulrahman de Riyad, la capitale saoudienne. Sur Twitter, la femme réclamait notamment l’abolition du système de tutelle du pays auprès de ses 2.597 abonnés. Ce système de tutelle donne aux hommes un contrôle légal sur certains aspects de la vie des femmes de leur famille. Dans plusieurs tweets, elle avait aussi appelé à la libération des prisonniers d’opinion saoudiens et avait protesté contre l’emprisonnement de Loujain al-Hathloul. Cette dernière, une militante, a fait campagne pour le droit des femmes saoudiennes à conduire. Une action qui lui a coûté incarcération et torture. Une peine record D’après les documents judiciaires consultés par plusieurs médias, les nouveaux chefs d’accusation incluent l’allégation selon laquelle Salma al-Shehab a aidé “ceux qui cherchent à provoquer des troubles publics et à déstabiliser la sécurité civile et nationale en suivant leurs comptes Twitter et en re-tweetant leurs tweets”. Toujours selon les mêmes documents, dans son appel, Salma al-Shehab a fait valoir que le peu de personnes qu’elle suivait ne représentaient pas un risque pour la sécurité. De plus, elle a expliqué qu’elle utilisait fréquemment la plateforme pour partager des photos de ses enfants et d’autres contenus inoffensifs. Après l’appel qui a fait suite à la première condamnation, les procureurs ont jugé que la peine d’emprisonnement à l’encontre de la militante était trop courte “compte tenu de ses crimes”. La précédente peine n’aurait pas permis “d’atteindre un objectif de modération et de dissuasion”. En bref, les procureurs ont demandé son inculpation, en vertu des lois antiterroristes du royaume, en plus de la loi sur la cybercriminalité. Selon plusieurs groupes de défense des droits humains, dont la Freedom Initiative, 34 ans de prison est la plus longue peine du pays contre un militant pacifique. Un système judiciaire critiqué Des ONG citent régulièrement le royaume en l’accusant de graves violations des droits humains. Elles pointent du doigt sa répression contre les dissidents politiques, les militantes féministes et les minorités. Par exemple, la manière dont le prince héritier Mohammed bin Salman cible les utilisateurs de Twitter dans sa campagne de répression. En avril dernier, Human Rights Watch a déclaré que des lois telles que “la loi antiterroriste et la loi contre la cybercriminalité, notoirement abusives, comportent des dispositions vagues et trop larges” qui feraient, de plus, l’objet d’une interprétation et d’une utilisation abusives. Cette loi antiterroriste constitue le fondement de la condamnation de Salma al-Shehab.