La PlayStation 4 de Sony accueille en ce mois de février une nouvelle exclusivité de taille, avec le remaster – en bonne et due forme – de Shadow of the Colossus, un véritable ovni sorti à l’époque sur PS2 et qui a gagné au fil des années un statut de jeu culte. Considéré comme un véritable chef d’oeuvre par certains joueurs, comme un petit ovni du jeu vidéo par d’autres, Shadow of the Colossus n’avait en tout cas laissé personne indifférent au moment de sa sortie, en 2005. Imaginé par Fumito Ueda – le papa d’Ico et de The Last Guardian -, le jeu avait déjà eu droit à une première réédition sur PS3. Cette fois, c’est le studio Bluepoint Games qui s’est collé à la tâche, pour nous concocter un remake digne de ce nom. Et le résultat est pour une fois à la hauteur de nos attentes! Car si les éditeurs ont souvent tendance à se contenter de remasters légers pour recycler leur catalogue de jeux, Bluepoint Games nous livre une copie entièrement revue et qui rend brillamment hommage à l’œuvre de Fumito Ueda, un peu à l’image de ce qu’Activision a fait avec le remake de Crash Bandicoot sur PS4. L’essentiel du travail ici porte toutefois sur l’esthétique du titre, et non pas sur le gameplay ou les mécaniques de jeu. Les décors du titre ont ainsi été entièrement revus et sont désormais beaucoup plus détaillés. Végétation luxuriante, reflets dans l’eau et rayons de soleil qui transpercent le ciel nuageux donnent vie à un univers que beaucoup considéraient trop épuré sur les précédentes générations de consoles. Le travail réalisé par Bluepoint Games est colossal. Et le résultat à la hauteur de l’attente des fans de l’univers fantastique d’Ueda. Toutefois, même si le résultat est grandiose, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts depuis la sortie du titre sur PS2, et le titre a quelque peu perdu de son génie. Au moment de sa sortie, Shadow of the Colossus était l’un des premiers titres à proposer une aventure dans un monde ouvert. Mais aujourd’hui, pratiquement tous les titres laissent le joueur parcourir leur univers librement. Avec les années, le concept du jeu a vieilli, et pour ceux qui n’avaient jamais touché au jeu à l’époque, sur PS2, le premier contact risque d’être décisif. Car oui, Shadow of the Colossus est une aventure grandiose et enivrante dans des décors poétiques (ou vides, c’est selon). Mais le “chef d’oeuvre” d’Ueda n’en reste pas moins un jeu d’aventure très répétitif, dont le scénario tient sur un timbre poste. Le joueur y incarne un jeune garçon nommé Wanda qui va partir à la chasse aux géants pour tenter de sauver sa bien-aimée. Chargé d’éliminer les 12 géants du jeu, il devra traverser les steppes vides du monde imaginé par Ueda pour se rapprocher des monstres, puis les attaquer en utilisant son arc à flèches et son épée, qui lui montrera le Talon d’Achille du monstre. Chaque affrontement sera l’occasion de mettre à l’épreuve vos talents de grimpeur. Car pour terrasser ces monstres, le joueur devra grimper sur leur dos, et faire preuve d’une certaine dextérité. Chaque mouvement consommera son énergie. Il sera dès lors important d’éviter les mouvements superflus et d’opérer des choix stratégiques. Une fois le monstre terrassé, le joueur devra revenir dans le sanctuaire pour se voir assigner sa prochaine mission. Répétitif par nature, le jeu doit tout son intérêt à ses affrontements contre des boss titanesques et à ses paysages splendides. Toutefois, à moins d’être complètement aveuglé par la beauté de son univers, difficile de ne pas remarquer ses nombreux défauts dès la première partie : de ses décors vides, qui se laissent toutefois volontiers parcourir sur le dos de notre fidèle canasson, à la gestion des caméras désastreuse, en passant par son gameplay souvent trop approximatif. Difficile de trouver dans ce titre la “perfection” vantée par de si nombreux médias spécialisés. Et ce, plus encore aujourd’hui qu’au moment où le jeu est sorti. N’ayons pas peur de le dire : si Shadow of the Colossus sortait aujourd’hui, la presse rendrait sans doute un avis beaucoup plus partagé sur ce titre, qui a décidément bien mal vieilli au fil des années. Les mécaniques de jeu, bien huilées pour l’époque, n’ont aujourd’hui plus aucun sens. Et on en vient à regretter que Bluepoint Games n’ait pas ajouté quelques petites nouveautés pour nous distraire entre deux parties de “chasse”. Dans le même ordre d’esprit, le scénario de Shadow of the Colossus reste un beau gâchis. D’une part, parce que l’univers fantastique du jeu méritait d’être plus développé. D’autre part, parce que le character design exceptionnel des créatures ne reflète pas de la qualité intrinsèque du jeu. Oui, Shadow of the Colossus nous ouvre les portes d’un univers fantastique, mais au niveau de la narration, Ueda s’est malheureusement contenté du minimum syndical – exception faite de la superbe cinématique d’introduction. Ceci étant, difficile de résister aux charmes d’un titre au concept aussi original, qui mérite toujours aujourd’hui son statut d’ovni. Difficile aussi de ne pas apprécier à sa juste valeur le travail de Bluepoint Games sur le jeu, tant au niveau graphique (voir dans le visuel présenté ci-dessus le passage opéré de la PS2 à la PS4) qu’au niveau de la fluidité du titre (qui tourne désormais à 60 images par seconde). Les multiples petits ajouts, du mode Photo aux filtres qui permettent de changer les couleurs du jeu, en n’oubliant pas la bande sonore, partiellement revue, achèveront sans doute de convaincre les fans d’investir dans ce remake qui mérite assurément le détour si l’univers d’Ueda vous a toujours séduit. Conclusion S’il demeure un incontournable, Shadow of the Colossus a toutefois très mal vieilli. Répétitif par nature, le “chef d’oeuvre” d’Ueda était l’un des premiers jeux en open-world sur les consoles de jeu, et avait séduit son audience avec son univers enchanteur et ses superbes décors. Remis au goût du jour, visuellement, le jeu accuse le poids des années au niveau de ses mécanismes de jeu, parfois mal huilés. Difficile toutefois de ne pas apprécier l’extraordinaire travail opéré par Bluepoint Games au niveau de la réalisation technique du soft, qui n’a rien à envier aux productions les plus récentes, et qui a également gagné en fluidité avec les années. Les fans d’Ueda applaudiront, les autres se contenteront sans doute de visionner le trailer du jeu entre deux parties de Dragon Ball FighterZ et de Monster Hunter.