Le “flight tracking”. Voilà le nom d’un outil en vogue qui propose de suivre les trajets en jet privé des milliardaires et de dénoncer les injustices climatiques. Sur les réseaux sociaux, des comptes proposent à leurs abonnés de suivre en ligne les trajets des jets privés des milliardaires. Et, plus la problématique climatique questionne nos quotidiens, plus ces comptes deviennent populaires et prennent de l’ampleur. En proposant ce tracking, ils permettent, d’une certaine façon, de pointer du doigt les pratiques peu écologiques de personnes fortunées. Des comptes militants Sur Instagram, le compte intitulé “L’avion de Bernard” propose un suivi du jet privé de la société LVMH (F-GVMA), propriété de Bernard Arnault et de Total (F-HTTO et F-HTTL). Le tout accompagné de l’estimation des émissions de CO2 de chaque trajet. Par exemple, on apprend que Total Énergie a effectué 25 vols en juillet et a émis 13 tonnes de CO2. Sur Twitter, le compte @i_fly_Bernard poursuit la même démarche auprès de plus de 54.000 abonnés. Les données sont récupérées grâce au site américain de suivi de vol ADS-B Exchange (Automatic Dependant Surveillance-Broadcast). La loi américaine exige que les avions qui se trouvent dans certaines zones soient équipés du système par satellite ADS-B. Ce dernier envoie périodiquement la position de l’appareil par radio aux contrôleurs aériens. Hier, quintuple vol de l’avion de Vincent Bolloré dans la même journée ! C’est un record depuis l’ouverture de ce compte – 8h01: Paris –> Palerme🔥 – 9h21: Palerme–> Nice 🔥🔥 – 14h04: Nice –> Paris 🔥🔥🔥 – 16h41: Paris –> Toulon 🔥🔥🔥🔥 – 18h12: Toulon –> Paris 🔥🔥🔥🔥🔥 pic.twitter.com/djq2AxnMse — I Fly Bernard (@i_fly_Bernard) August 9, 2022 Selon le compte Twitter, qui a effectué un suivi de six avions détenus par des grandes fortunes françaises durant tout le mois de juillet, cela représente “123 heures de vol pour un bilan carbone de 520 tonnes”, soit “l’équivalent des émissions d’un Français moyen pendant 52 ans”. Pourquoi les jets privés Aux États-Unis, en France et dans le monde entier, les révélations sur ces trajets en jet font réagir, tant du côté des militants que de celui des milliardaires. D’ailleurs, en janvier, Elon Musk, le patron de Tesla, a proposé 5.000 dollars à Jack Sweeney pour fermer le compte “ElonJet”. Ce dernier, suivi par plus de 480.000 personnes, suit tous les mouvements de l’avion du multimilliardaire, à la trace. Landed in San Jose, California. pic.twitter.com/aAGWDQsBIl — ElonJet (@ElonJet) August 9, 2022 Les jets privés sont souvent l’objet de critiques par les défenseurs de l’environnement. Ils sont considérés comme l’un des moyens de transport les plus polluants, avec une empreinte carbone record. Par exemple, le Bombardier Global Express, le modèle que possède Bernard Arnault, fait partie de ceux qui consomment le plus de carburant parmi tous les appareils conçus spécifiquement pour les vols privés. Il consommerait 1,456 kg de carburant par km. Tout en sachant que, d’après l’Organisation de l’aviation civile internationale (ICAO), 1 kg de carburant brûlé émet 3,16 kg de CO2 dans l’atmosphère. Autrement dit, le jet privé du patron de LVMH possède une empreinte carbone moyenne de 4,60 kg de CO2 émis dans l’atmosphère pour chaque km de vol parcouru. Il rejette 2.051 tonnes de Co2 pour 400 heures de vol. Ainsi, même s’ils ne représentent qu’une faible part des émissions de CO2 mondiales, ces avions d’affaires font exploser l’empreinte carbone de leurs usagers. Cabine du jet d’affaires Global 7500 de Bombardier. Crédits : AFP La réponse du secteur Face à cette vague de publications dénonciatrices, la GAMA affirme que les émissions de CO2 du secteur ne représentent qu’une faible part des émissions de CO2 mondiales. À savoir que la GAMA est l’association commerciale de l’industrie représentant les constructeurs d’avions. “La plupart des parties prenantes reconnaissent que la contribution de l’aviation civile représente 2% des émissions mondiales de CO2 et 3% des émissions de gaz à effet de serre, selon les estimations du rapport du GIEC. La contribution de l’aviation d’affaires est estimée à 2% des émissions de l’aviation, soit 0,04 % des émissions mondiales”, peut-on lire dans le rapport. Le document indique également que les communautés de fabricants et d’exploitants de l’aviation d’affaires ont développé conjointement un programme agressif. L’objectif ? Contribuer aux objectifs généraux de l’aviation en matière d’environnement. Un des objectifs spécifiques énoncés est le suivant : une réduction des émissions totales de CO2 de 50% d’ici 2050 par rapport à 2005.