L’un des meilleurs Zelda sur portable revient en force sur Nintendo Switch, bénéficiant d’une modélisation 3D ainsi que d’une toute nouvelle direction artistique. Mais, après plus d’un quart de siècle, la magie opère-t-elle toujours sur l’île de Cocolint ? Vingt-six ans se sont écoulés depuis la sortie de Link’s Awakening sur Game Boy. Un épisode qui a marqué les esprits des joueurs et qui avait eu droit à une version colorisée en 1998, dite DX, sur Game Boy Color. C’est donc davantage un remake de cette édition (temple des couleurs compris) que nous propose aujourd’hui Nintendo, qui bénéficie du savoir-faire du studio de développement Grezzo, qui nous avait déjà livrés les fidèles portages sur 3DS d’Ocarina of Time et de Majora’s Mask. Une oasis de nostalgie L’histoire de cet épisode est à part dans la série puisqu’elle ne se déroule pas à Hyrule et fait fi de toute Triforce. Tout débute après que Link a échoué sur l’île Cocolint, sur laquelle il s’aventure dans le but de réveiller un Poisson-Rêve qui pourrait l’aider à rentrer chez lui. Pas de princesse, ni de Ganon, donc. Une grande part d’exploration, beaucoup de découverte et les énigmes à résoudre dans les donjons sont bien de la partie, mais ce Link’s Awakening possède ce petit charme en plus, cette petite touche magique qui fait qu’il a une place toute particulière dans le cœur des joueurs de la première heure. Cette « magic touch » est ici magnifiée par une superbe direction artistique qui, si elle en a interpellé certains par son approche très « poupée », s’avère in fine très travaillée et soignée, permettant d’afficher des personnages incroyablement charmants ainsi qu’une île de Cocolint plus colorée et vivante que jamais. Un effet de flou a également été ajouté en bords d’écran, ce qui appuie l’aspect onirique du titre. Une vraie réussite, tout comme les musiques qui ont été redynamisées de la plus belle façon qui soit. Que du bonheur. Du classique, mais en mieux Côté narration et level design, rien n’a changé et les nostalgiques retrouveront leurs repères avec plaisir tandis que les nouveaux pourront profiter d’un des Zelda les plus accessibles et solide en matière de game design, quoiqu’un peu facile (un mode héroïque a fait son apparition pour corser un peu les choses). Exploration de l’île, agencement des salles dans les donjons, passages en 2D emprunté au style plateforme, les références à l’univers de Mario, tout est là, ou presque, jusqu’au moindre secret repris de l’époque (voler, c’est pas bien – les connaisseurs comprendront). Pas de véritable surprise, donc, mais quelques améliorations. A commencer par les contrôles. Nouvelle console oblige, il est possible désormais d’assigner davantage d’objets grâce aux boutons de la Switch et d’utiliser directement son bouclier ainsi que de courir en utilisant les gâchettes. Les allers-retours dans l’inventaire sont ainsi moins fréquents qu’auparavant pour fluidifier l’exploration, qui se fait désormais sans coupure entre les différents écrans des zones. Malheureusement, on constate de fâcheux ralentissements lors des passages d’une zone à une autre et des chutes de framerate dans les tableaux présentant de multiples ennemis. Un bémol qui se fait davantage ressentir en mode docké qu’en nomade, d’ailleurs. Du Zelda maker en mode primitif La seule vraie nouveauté est l’éditeur de donjons, situé à l’endroit où il y avait jadis la boutique photo. On peut y débloquer des carreaux représentant des pièces de donjons déjà visités, que l’on peut agencer pour recréer de nouvelles itérations. Il ne s’agit pas d’un éditeur complet à la Mario Maker, mais d’un petit bonus sympathique, davantage présenté sous forme d’énigme où il faut réussir à connecter des pièces toutes faites, non personnalisables, avant de pouvoir s’aventurer pour tester sa nouvelle configuration de donjon ainsi créée. L’intérêt reste donc limité puisque l’on visite les mêmes salles que dans la quête principale, sans la moindre pièce inédite. Un bonus qui devient rapidement répétitif et dispensable. On regrette également que cela ait complètement remplacé la prise de photos pour le compte de la souris adepte de clichés originaux présente dans la version DX. Au prix d’un petit effort de la part des développeurs, les deux auraient certainement pu coexister. Dommage. La création de donjons n’augmente que très sensiblement la durée de vie du titre qui est d’origine plutôt ramassée, l’aventure pouvant se terminer en moins de 10 heures. Peut-être un peu court au vu des standards actuels, d’autant que le titre est vendu au prix plein, ce qui est un peu abusif pour un remake, aussi beau soit-il. L’achat reste néanmoins vivement recommandé pour les néophytes qui découvriront là une aventure inoubliable. Quant aux fans de la saga, on ne les blâmera certainement pas de craquer devant l’irrésistible trogne de Link et de vouloir se replonger dans une aventure aussi dépaysante que poétique. Conclusion Link’s Awakening est une délicieuse madeleine de Proust remise très proprement au goût du jour par Nintendo et Grezzo, qui n’ont pris que très peu de risque. Pas très grave, puisque la refonte graphique est magnifique et que le game design redoutablement efficace de l’époque est parfaitement conservé. Le plaisir de se (re)plonger dans cette aventure unique dans d’excellentes conditions est bien présent et seuls quelques ralentissements viennent un peu gâcher la (re)découverte. On est donc en présence d’un remake très respectueux et visuellement magnifié, mais qui aurait peut-être mérité un peu plus de contenu neuf, l’éditeur de donjons ajouté n’étant que moyennement convaincant.