Premier chapitre d’une anthologie de l’horreur, par les créateurs d’Until Dawn, The Man of Medan était attendu au tournant par tous les passionnés de cinéma fantastique. Le jeu de Supermassive Games a-t-il de quoi vous donner la chaire de poule? Redescendu de ses lauriers depuis la sortie de The Impatient et de Bravo Team, le studio suédois Supermassive Games cherche aujourd’hui à retrouver la voie du succès en misant sur ce qui a fait le succès de ses best-sellers. Reprenant presqu’intégralement le concept d’Until Dawn, The Man of Medan est le premier chapitre d’une anthologie de l’horreur baptisée “The Dark Pictures Anthology”, éditée par le groupe Namco Bandaï. A l’inverse d’un Resident Evil, The Man of Medan ne joue pourtant par la carte du frisson pur mais du jump scare puisque l’expérience s’apparente ici davantage à un film interactif qu’à un véritable jeu de survie. Passif, le spectateur n’interagira avec le jeu qu’à quelques occasions seulement, choisissant les réponses des personnages qu’il incarne, les dirigeant à travers quelques longs couloirs, propices aux jump scares, et appuyant frénétiquement sur des combinaisons de touches lors des quelques séquences d’action qui rythment le jeu. Il ne faut donc pas comparer Man of Medan à un jeu d’horreur, mais davantage à un film d’horreur, car le jeu de Supermassive Games trouve très clairement son inspiration dans le septième art. Un très gros travail a été fait sur la mise en scène. Le jeu entier ressemble – à vrai dire – à un film. Les dialogues alternent les vues, la caméra est régulièrement placée dans des angles qui donnent lieu à des séquences esthétiquement très travaillées et le joueur se sent finalement très spectateur dans cette aventure pourtant ludique. Les choix du studio étonnent toutefois pour le choix de cette première aventure, tant au niveau du casting – presque détestable – que du contexte. Pour ce premier volet, les développeurs ont tiré l’inspiration de la légende du Ourang Medan, un navire hanté, un thème qui a rarement convaincu dans le septième art. Après une courte introduction qui nous explique ce qu’il est arrivé à bord du bateau, le joueur fait donc connaissance avec la petite équipe d’aventuriers qui se sont embarqués pour une plongée dans l’océan et se retrouvent par un concours de circonstance à bord du navire hanté. Ce qui frappe dès le premier contact, c’est la qualité d’écriture, très moyenne. La plupart des dialogues sont plats, les développeurs ne prennent pas le temps de développer chaque personnage et on en vient finalement à se désintéresser complètement de leur sort. Plus inquiétant : si les choix du joueur influencent l’histoire, on se surprend souvent à douter de l’impact des dialogues choisis sur la progression de l’histoire. Pour autant, de par son rythme, sa forme narrative et ses angles de caméra, Man of Medan n’en reste pas moins un jeu agréable à parcourir. Les amateurs de frisson n’en auront toutefois pas forcément pour leur argent puisque le jeu n’est pas si terrifiant que cela, ni excitant au niveau de son scénario. Les jump scares ont tendance à être un peu trop faciles et on se surprend à très vite anticiper les frayeurs. S’il avait été un film, Man of Medan aurait sans doute été un gros pétard mouillé, voire au mieux une série B. Et c’est là tout le problème, car le jeu aurait très clairement dû être beaucoup plus travaillé tant au niveau de son scénario que de l’écriture. Au niveau du gameplay, le résultat n’est pas non plus très convaincant. Le joueur reste passif la plupart du temps et les rares séquences qui lui donnent un minimum de liberté sont un véritable enfer à parcourir. Les choix – très originaux – des angles de caméra ne rendent pas du tout pratique le contrôle du personnage à l’écran. Du coup, on se retrouve à avancer et reculer, pour prendre ses marques, avant de découvrir comme par magie dans quelle direction orienter le stick pour avancer dans la bonne direction. Pour le reste, on apprécie la présence d’un mode multijoueur qui permet à plusieurs participants de sélectionner les dialogues et d’avoir donc un impact sur l’histoire. C’est ludique et cela donne surtout un tournant complètement inattendu au scénario. La présence de plusieurs fins poussera les joueurs les plus motivés à recommencer plusieurs fois l’aventure – pas bien longue en soi puisque celle-ci se boucle en 4 petites heures seulement. Les collectibles sont un autre élément intéressant pour les joueurs les plus passionnés. Mais ne nous voilons pas la face, la majorité des joueurs ne parcourront le jeu qu’une seule fois, et même si le jeu est bon marché – il se vend aux alentours de 25€ -, ils n’auront pas vraiment l’impression d’avoir fait une bonne affaire. Si Man of Medan déçoit, tant au niveau de son contenu que de ses qualités intrinsèques, le concept qui se cache derrière le jeu n’en reste pas moins excellent et laisse augurer le meilleur pour la suite. Avec un scénario plus alléchant, des rôles principaux plus développés et moins clichés et un contexte plus original, Supermassive Games ferait sans doute mouche. D’autant plus que la réalisation graphique est sonore met clairement le jeu à son avantage. Visuellement, Man of Medan est superbe. La direction artistique est inspirée, les décors sont flippants, les angles de caméra stylés, la mise en scène soignée et les doublages en anglais et musiques immergent parfaitement dans l’action. Le seul bémol relevé concerne les personnages centraux, mal définis, pas intéressants et pas forcément très bien modélisés. Conclusion Premier chapitre d’une anthologie de l’horreur qui s’annonce très prometteuse, Man of Medan n’en reste pas moins un jeu très décevant, de par son thème moyennement intéressant et son casting peu alléchant. Difficile en effet de surprendre avec une histoire de bateau fantôme, des rôles principaux sans grand charisme aux réactions qui manquent de naturel et des dialogues souvent très mal écrits. Dans le fond, le concept est pourtant excellent. Finalement plus proche d’un film interactif que d’un jeu d’horreur, Man of Medan place le joueur dans une position presque passive, pour une expérience de jeu presqu’entièrement basée sur la narration. Le concept aurait pu fonctionner à merveille si les choix des développeurs n’avaient pas réduit ce Man of Medan au statut de série B sans ambition. Le jeu est néanmoins sauvé par une réalisation soignée, une bande son efficace et un tarif léger, qui justifierait presqu’à lui seul qu’on se laisse tenter par cette expérience atypique, calquée sur l’excellent Until Dawn.