C’était l’un des jeux de cette fin d’année au sujet desquels nous n’osions pas nous proposer. D’une part, parce que si le talent de Double Fine n’est plus à prouver, le studio n’a pas livré que des pépites. D’autre part, parce qu’il faut bien l’avouer, malgré les trailers, on n’avait toujours aucune idée de comment Keeper se jouerait… Double Fine Productions vous dit certainement quelque chose. On doit à ce studio quelques pépites du jeu vidéo, comme les Psychonauts 1 & 2, mais aussi Brutal Legend, Costume Quest et Stacking. A la tête du studio, on retrouve le créateur de génie Tim Schafer, auteur des classiques du point & click Full Throttle, Grim Fandango et Day of the Tentacle, que son studio a d’ailleurs remasterisés il y a quelques années. Alors forcément, quand Double Fine annonce un nouveau titre, on écoute avec attention… Il faut toutefois bien l’admettre, le studio n’a pas un historique parfait. On retrouve dans ses titres quelques jeux fort en deçà, qu’il s’agisse des deux Costume Quest, de ses productions Kinect ou plus récemment de RAD. S’il y a un élément commun à toutes les productions Double Fine, c’est les mondes étrangers dans lesquels le studio nous plonge. Et Keeper n’échappe pas à la règle… La direction artistique est impeccable. On retrouve derrière cette production le grand Lee Petty, Art Director qui a travaillé sur Brutal Legend, Stacking, RAD et Psychonauts 2. L’artiste est parmi les plus reconnus de l’industrie et il faut le reconnaitre, son travail rayonne de nouveau avec Keeper. Visuellement, ce jeu est une pure merveille. Les décors, enchanteurs, semblent avoir été peints à la main. Ils changent également en temps réel à travers des manipulations temporelles sublimes. La patte artistique le rapproche d’une production Pixar, avec toutefois le style très particulier du studio. Sachez-le toutefois, si certains décors affichent une profondeur de champ, le jeu se joue principalement comme un jeu en 2 dimensions. La profondeur de champ est là juste pour donner une atmosphère et développer un univers, à l’exception de quelques hubs où il sera possible de se déplacer en 3 dimensions. Et c’est là qu’on se rend compte de l’incroyable travail réalisé par les développeurs de Keeper. Le jeu parvient de temps en temps à nous surprendre… Pad en mains, on découvre un curieux mélange de jeu narratif et de puzzles. Ceux qui s’attendaient à un jeu d’aventure ou de plates-formes seront forcément déçus. Keeper est avant tout un jeu narratif et contemplatif dans lequel on admire des tableaux vivants, avec quelques puzzles basés sur la manipulation du temps. Rien de très compliqué toutefois, ni de très original d’ailleurs. Et c’est sans doute là la plus grosse déception du titre, qui manque réellement d’ambition dans son gameplay et nous rappelle quelque part l’également très décevant South of Midnight, une autre production Xbox qui lorgnait elle aussi du côté des “walking simulators”. Alors oui, Keeper est un jeu visuellement sublime, qui prend place dans un univers charmant et qui nous surprend avec ses choix artistiques. On y incarne un phare abandonné depuis des années, réveillé par un oiseau de mer, qui va partir pour un voyage initiatique à travers le continent. Le monde a été, semble-t-il, dévasté par un terrible accident et l’humanité a été remplacée par de nouvelles espèces qui sont apparues. Des objets ont pris vie. De nouveaux dangers se sont aussi développés… Vous n’en apprendrez pas forcément plus sur le récit, le jeu n’étant pas narré ni commenté. Tout se vit à travers l’expérience. Et c’est là que le jeu excelle. Les paysages traversés sont extrêmement variés. Il faut toutefois bien l’admettre, malgré son prix, son univers charmant et sa patte artistique unique, on a eu bien du mal à tomber sous le charme de Keeper, la faute en grande partie à son côté excessivement contemplatif. La partie ludique se résume à la résolution de quelques énigmes bien trop faciles à résoudre, et sans grande inspiration. Alors oui, c’est une cible un peu facile car c’était la volonté des développeurs d’imaginer un titre contemplatif, mais tout de même, il n’aurait pas été très difficile d’ajouter quelques mécanismes de jeu pour rendre le tout plus digeste. D’autant plus que le jeu s’essaye à quelques reprises à la plate-forme et que ça fonctionne plutôt bien. Ces passages sont toutefois excessivement rares. Dans le même ordre d’esprit, sachez qu’il n’y a aucun mécanisme de combat si ce n’est l’utilisation de la lampe de votre phare pour écarter des “ennemis et vous frayer un chemin. C’est un peu léger tout de même, d’autant plus que le rythme est assez mou et qu’on en fait vite le tour… Keeper est donc plutôt le type de jeu pop-corn qu’on fera le temps d’une soirée, grâce à son abonnement Gamepass, et sur lequel on ne reviendra pas forcément. Ce n’est pas la pire prod’ du studio, mais pas la meilleure non plus. Le jeu laisse un souvenir plaisant avec son expérience contemplative mais ne marquera pas l’histoire du jeu vidéo à l’image d’un Psychonauts par exemple. Conclusion Avec Keeper, Double Fine Productions livre l’un de ses jeux les moins marquants. L’expérience se veut avant tout contemplative dans ce jeu narratif sans dialogues, qui a le mérite de développer un univers graphique superbe composé de tableaux vivants. Artistiquement, Keeper est une pépite. Sur le plan ludique en revanche, on se rapproche d’un walking simulator saupoudré de quelques puzzles pas très inspirés. Pas un mauvais jeu, mais pas un titre marquant non plus. Plaisant à parcourir, le jeu de Double Fine se consommera idéalement dans le cadre d’un abonnement au Gamepass.