Sous la surface, chaque ordre compte, chaque goutte d’eau peut sceller votre sort. UBOAT transforme la mer en champ de tension permanente — un huis clos métallique où la survie tient à un boulon. Existe-t-il honnêtement un studio plus adapté que Deep Water pour développer un titre de gestion d’un sous-marin ? Probablement pas. Avec UBOAT, le studio de développement polonais s’attaque à un pan méconnu de la Seconde guerre mondiale, déjà mis en lumière dans les année 1980 avec le cultissime film ouest-allemand Das Boot. Ici, c’est une simulation ultra-complète dans les fonds marins qui nous est proposée, dans la peau d’un officier amiral de la Kriegsmarine allemande. Deep Water Studio donne le ton dès le lancement du jeu, avec un joli message en hommage aux milliers de jeunes hommes partis s’engager dans la marine allemande avec l’espoir de revoir un jour leur proche. Pour la plupart d’entre eux, jamais ils ne rentreront chez eux, ayant servis de chair à canon dans cette terrible guerre. Et pour cause, la bataille de l’Atlantique est considérée comme la plus longue de la guerre, ayant causé la mort de quelque 100 000 soldats et marins et la perte de 783 sous-marins. Dans la peau d’un officier, vous pouvez parcourir le navire pour en utiliser les outils ou échanger avec le personnel. UBOAT est le type de jeu qui donne le contrôle total au joueur. Vous êtes le “Herr Kaleu” du sous-marin (le Commandant en français), et devez à la fois prendre soin du sous-marin et de vos hommes. Les mécaniques de gameplay sont ultra poussées, de sorte à ce que vous compreniez bien que la survie de la mission et des gars est en jeu à chaque instant. Et pour cause : le moindre trou dans la coque non rebouché conduit à une mort presque assurée pour l’équipage. Vous commencez votre aventure en créant votre avatar. Au moyen d’un menu de personnalisation très sommaire mais suffisant dans ce cas, vous créez le futur commandant de bord qui gèrera l’équipage. Ensuite, le titre vous proposera d’embarquer pour un premier tutoriel. Assez long, celui-ci se conclut en une petite heure. Il permet toutefois de bien comprendre tous les principes du jeu ainsi que toutes les ficelles permettant de mener à bien une mission. L’immersion est telle que vous devrez donner des ordres à vos hommes en chuchotant lorsque vous serez sous la mer, en mode discret, pour éviter d’être repérés. Puis vous voilà prêt à partir en mer. Avant le grand départ, l’arrêt au port permet de peaufiner certains aspects de votre navigation. Vous échangez avec l’officier de liaison, auprès de qui vous pourrez demander une permission pour votre équipage si le besoin s’en fait ressentir, vous demanderez au commandement de vous attribuer une mission… Toujours dans ce même port, vous aurez intérêt à faire une halte par l’entrepôt, où racheter des nouvelles torpilles pour attaquer les navires ennemis, des rations pour votre personnel, faire le plein de carburant… Les calculs sont très importants, puisqu’en fonction de votre mission, vous aurez à prendre suffisamment de ressources, mais également à ne pas trop grignoter sur le budget qui vous est alloué. Le carburant est probablement ce qu’il y a de plus important, puisque si vous tombez à court en pleine mer, alors il faudra demander un ravitaillement en urgence, ce qui est rarement bien vu par le haut commandement… Engagez également des jeunes matelots auprès de l’officier de recrutement afin d’avoir une réserve importante et de ne pas trop surcharger le personnel. En effet, le matériel c’est important, mais le capital humain l’est encore plus. Si vous n’avez pas du personnel motivé, qui vous fait confiance et qui ne panique pas à la moindre alarme déclenchée, alors votre mission ne pourra que bien se dérouler. C’est pourquoi il est important de jauger votre personnel durant les quelques premières missions en mer où ils pourront montrer de quoi ils sont capables et, mieux encore, s’ils résistent à la pression. Le personnel qui craque trop vite pourra alors être remplacé par bien mieux. Les missions qui seront attribuées sont plutôt variées. Cela passe par de l’interception de navires marchands à de l’attaque pure et dure de sous-marins ou frégates ennemis en passant par de la patrouille, de la reconnaissance ou du transport de marchandise ou de VIP. Pour y parvenir, vous avez le choix entre plusieurs sous-marins historiques, mais attention : plus un sous-marin est évolué et perfectionné, plus il sera complexe à manoeuvrer tant les commandes et le personnel seront nombreux. Visuellement, le jeu est vraiment pas beau. Seuls certains environnements sur la mer sont sympathiques, bien que vite ternis par le passage de l’eau sur le pont. Parce que ce qui fait la force de UBOAT, c’est son gameplay. La gestion du sous-marin est absolue. Que ce soit à la troisième personne en observant le sous-marin en vue de profil ou à la première personne dans la peau de vos officiers, vous pouvez vous servir d’absolument tous les outils de l’immergé. Tantôt vous devrez regarder par le périscope d’attaque pour planifier une offensive, tantôt utiliser la radio pour détecter des ennemis… L’immersion est totale, et rarement nous avions vu une telle possibilité de gestion dans un jeu. Cela peut même en devenir imbuvable pour ceux qui recherchent une expérience moins exigeante. Heureusement, il reste possible d’être en mode “Dieu” et d’assigner des tâches à votre équipage sans trop vous soucier du comment. Chaque officier possède d’ailleurs une spécialité, comme infirmier, mécano ou radio-opérateur, à qui l’on peut assigner un ou deux matelots pour améliorer le rendement. Donnez l’allure en choisissant la vitesse, choisissez la profondeur du sous-marin, donnez l’ordre de déclencher l’alarme si vous êtes repéré ou, au contraire, descendez dans les fonds marins, tout en faisant attention à vos réserves d’oxygène et à passer en mode silencieux, pour être furtif. Le fond du titre est impressionnant, mais c’est moins le cas de la forme. Sur consoles, le titre n’est vraiment pas très beau. Si l’intérieur des sous-marins est très détaillé, les environnements sont d’un vilain inégalé, les fonds marins imbuvables, les animations et la modélisation des personnages d’un autre temps… Soyons toutefois honnête, certains effets de lumière sur la mer, avec le soleil, rendent assez bien, mais ils se font rares. Bien sûr, les développeurs ont mis tous leurs moyens dans l’aspect gestion et le gameplay, mais de là à proposer un jeu semblant provenir du début des années 2000. Et encore. À côté de la finition, ce n’est rien. Nous n’avons pas eu la chance de le tester sur PC où les commandes devraient être plus dociles, mais sur consoles, UBOAT est pratiquement injouable, avec des menus qui s’activent étrangement et de nombreux bugs d’interface. Les ralentissements perturbent quant à eux le déroulé des parties et, cerise sur le gâteau, le titre crash régulièrement, nous faisant perdre notre progression. Conclusion UBOAT est une expérience fascinante sur le fond, mais difficilement pardonnable sur la forme. Deep Water Studio signe un simulateur d’une richesse rare, capable de captiver les passionnés de stratégie et d’histoire grâce à une gestion d’équipage et de matériel d’une précision exemplaire. L’immersion, soutenue par des mécaniques exigeantes et une tension constante, rend chaque mission haletante. Mais la technique, datée et instable, vient ternir ce tableau ambitieux : graphismes dépassés, interface laborieuse et crashs récurrents rappellent que l’œuvre aurait mérité plus de polish avant d’embarquer sur consoles. Un jeu admirable dans sa vision, mais réservé à un public de capitaines patients, prêts à encaisser la houle.