Attendue depuis des années, la suite de Mafia 3 n’est en réalité pas tant une suite mais davantage une préquelle. Mafia: The Old Country promettait de ramener la série Mafia à ses racines en misant tout sur la narration et en abandonnant la formule open world. Le moins que l’on puisse dire, c’est que les productions Hangar 13 ont tendance à diviser. Si Mafia: Definitive Edition (2020) a séduit par sa fidélité à l’original, Mafia III a divisé avec son monde ouvert répétitif et le récent reboot de Top Spin a reçu un accueil assez mitigé. Avec Mafia: The Old Country, le studio répond aux critiques des fans en abandonnant l’approche open world de Mafia 3 pour revenir à la formule linéaire des deux premiers opus, dans lesquels la narration était centrale. Le défi était clair : recréer l’atmosphère cinématographique qui a fait la renommée de la série tout en explorant une période inédite, la Sicile des années 1900. Votre monture vous permettra de vous déplacer sur toute l’île. Mafia: The Old Country nous plonge dans la Sicile de 1904, dans la ville fictive de San Celeste, où l’on suit Enzo Favara, un jeune homme vendu par son père pour travailler dans les dangereuses mines de soufre, avec son frère, qui y laissera sa vie. Après un effondrement dramatique, Enzo s’échappe et trouve refuge auprès de Don Torrisi, chef d’une famille mafieuse en conflit avec les Spadaro. L’histoire, qui s’étend sur plusieurs années, explore son ascension dans le crime organisé, mêlant loyauté, trahison et un amour interdit avec Isabella, la fille du Don. Et il faut bien reconnaitre que sur le plan narratif, Deck 13 réalise un sans faute : l’historie est prenante, les dialogues sont bien écrits, les personnages charismatiques, le doublage excellent et les cinématiques terriblement efficaces. The Old Country n’a rien à envier à une production hollywoodienne. Plusieurs histoires s’entrelacent ici et des thèmes forts sont portés, de la vengeance d’un frère aux rivalités familiales en passant par l’ascension d’un jeune mafieux, l’exploitation du peuple,… La seule course du jeu est l’un des moments forts de The Old Country. Mafia: The Old Country brille dans le mélange du narratif et de l’action, avec des cinématiques qui s’intègrent parfaitement dans les séquences de gameplay. Cela a bien sûr nécessité quelques changements dans le gameplay, comme l’abandon du monde ouvert du troisième opus pour une formule plus dirigiste. On n’est plus vraiment face à un jeu open world, même si The Old Country conserve certains éléments de cette formule. A la place, on se retrouve davantage face à un jeu d’action qui met l’accent sur la narration et mélange diverses séquences de jeu : combats au corps à corps, infiltration, gunfights, course… Les combats s’articulent autour d’un système de couverture typique des shooters des années 2010, et ça fonctionne plutôt bien même si on reprochera au titre un système de visée un peu vieillot. Les armes d’époque (revolvers, fusils à répétition, fusils à canon scié) offrent un feeling satisfaisant, renforcé par un sound design explosif. L’IA souffre aussi de quelques comportements incohérents. Ces séquences de jeu ne représentent toutefois pas le coeur du gameplay, tout au plus 10 à 15% des séquences de jeu. The Old Country brille en effet par sa diversité. A côté des gunfights, on retrouve des séquences de combat au couteau, des duels dans lesquels l’on alterne entre esquive, parade et attaques (coup, estoc, brise-garde). La mise en scène est dramatique, cinématographique même, elles se révèlent assez techniques avec le système d’esquive, de brise de garde et de parade, mais peuvent vite paraître répétitives, Deck13 ayant eu la mauvaise idée d’en glisser une en moyenne par chapitre. Entre des séquences d’action, on découvre quelques scènes de vie en Sicile rurale. Les séquences de furtivité sont sans doute celles qui diviseront le plus les foules. Les missions imposent souvent des séquences où être repéré entraîne un échec immédiat. L’ennui, c’est que ces séquences de jeu sont beaucoup trop simples : les gardes suivent des tracés très prévisibles, les nombreux objets de distraction comme les bouteilles facilitent encore davantage la tâche du joueur, et il est possible de se débarrasser de chaque garde en l’étranglant. Ca aurait pu être un vrai atout pour le jeu mais en l’état, ces séquences trop rudimentaires permettent juste de varier (un peu) les plaisirs. Elles sont toutefois loin d’être mauvaises, juste pas au niveau du reste de la production. Le jeu propose également quelques séquences de courses et courses-poursuites très réussies, à pied, à cheval ou en voiture, des séquences encore une fois très cinématographiques et qui fonctionnent plutôt bien, même si on aurait aimé en retrouver davantage. On dénombre en effet une seule course en voiture, qui est l’un des moments forts du jeu… Pour le reste, c’est à 50% du narratif, avec des cinématiques très visuelles, d’excellents dialogues et quelques interactions avec les PNJ sur le côté. Et c’est là que le jeu surprend le plus avec des personnages secondaires très attachants, des enjeux captivants et une intrigue qui ne cesse à gagner en intensité. The Old Country réalise une petite prouesse à ce niveau en faisant mieux que son ainé. Passons à présent à l’open world. Car oui, il y en a malgré tout un… sous-exploité. L’approche narrative semble avoir contraint Deck13 à se concentrer sur des passages linéaires, dans un monde ouvert au potentiel énorme qui est malheureusement sous-exploité. Il n’aurait pas été de refus d’avoir accès à quelques missions additionnelles comme des courses de véhicules, de chevaux ou des missions d’élimination dans l’open world en question. Clairement, c’est une erreur de la part du studio qui aurait facilement pu implémenter quelques ajouts. Est-ce dramatique ? Absolument pas, même sans cela, le jeu est une franche réussite. L’intrigue vous tiendra scotché 15 à 20h de jeu et le jeu comprend une bonne demi-douzaine de séquences mémorables, même pour un gamer expérimenté. Cela ne veut de surcroit pas dire pour autant que le titre n’intègre pas quelques à-côtés : on peut collecter un paquet d’objets (photos, journaux, statues de renards,…), et on peut améliorer les compétences de notre personnage avec un système étrange de statuettes. La rejouabilité du titre est également assez bonne malgré sa linéarité. Chaque chapitre pourra être rejoué indépendamment par la suite, pour profiter à nouveau des séquences les plus marquantes. Point d’importance : le jeu est vendu sous la barre des 50€, l’éditeur ayant sans doute eu peur de voir une partie des ventes s’envoler sans l’open world… Un joli cadeau pour les fans, le titre ayant tout d’un triple-A. Sur le plan technique, Mafia: The Old Country est une réussite éclatante. La Sicile est une région magique qui brille par la diversité de ses paysages avec ses petits villages alpins plein de charme, ses vignobles dorés, ses grottes abandonnées et ses domaines luxueux. The Old Country est un jeu globalement très joli avec des paysages détaillés, des animations faciales bluffantes, des modèles soignés. On pourra lui reprocher toutefois quelques baisses de framerate, quelques soucis de chargement de textures en arrière plan et quelques modèles moins réussis mais rassurez-vous, il reste l’un des plus beaux jeux de sa génération. A moins de s’attendre (à tort, cela n’ayant jamais été partie de l’ADN de la série) à un open world musclé, difficile donc d’être déçu par cette excellente préquelle qui parvient à faire mieux que l’opus original et séduit de surcroit par ses décors atypiques. Conclusion On ne l’attendait pas forcément au tournant et pourtant Mafia: The Old Country est une vraie bonne surprise, peut-être même le meilleur opus de la série. Le jeu brille par sa narration soignée, son scénario captivant et ses personnages ultra-charismatiques. On est littéralement face à l’une des meilleures histoires de gangsters de ces 20 dernières années. Le dépaysement est garanti aussi avec ce voyage en Sicile, en 1905. Visuellement très réussi, le titre offre une expérience avant tout cinématographique, toutefois très variée aussi au niveau des séquences de jeu avec des gunfights musclés, des combats au couteau, des courses poursuites haletantes, de l’infiltration, de courses de voiture… Un divertissement triple-A très maîtrisé, qui ne souffre que d’un léger manque de finesse dans son gameplay (infiltration & gunfights) et qui nous est vendu à un prix extrêmement attractif. En dépit de ses petits défauts, Mafia: The Old Country est un candidat très sérieux au titre très convoité de GOTY.