16 ans, c’est le temps qui sépare la sortie du dernier Metal Slug canonique, à savoir Metal Slug 7 qui a vu le jour sur Nintendo DS, du nouveau spin-off qui vient de sortir. Certes, quelques épisodes destinés aux supports mobiles ont fait leur apparition entre temps, dont des Tower Defense, mais aucun jeu n’a réellement retenu l’attention. Une question se pose donc : ce spin-off Metal Slug Tactics parvient-il à renouer avec l’esprit de la licence, et ce, suffisamment pour signer son grand retour ? DotEmu est un éditeur spécialisé dans le retour de certaines licences cultes. L’entreprise est notamment associée à Wonder Boy III : The Dragon’s Trap, Streets of Rage 4, Windjammers 2 ou encore TMNT Shredder’s Revenge. Dernièrement, elle signe le retour d’une célèbre licence de SNK, à savoir Metal Slug. Le projet a été développé par Leikir Studio, un studio de développement parisien fondé en 2012 auquel on doit Isbarah, Wondershot ou encore Rogue Lords. Ce dernier a fait un pari audacieux en offrant à la licence une toute nouvelle approche. Oubliez le run ‘n gun des épisodes canoniques, ce spin-off prend la forme d’un RPG tactique au tour par tour, avec un aspect rogue-like. Il faut bien l’avouer, le T-RPG est un genre de niche. De prime abord, le choix de Leikir Studio est surprenant, surtout pour remettre sous le feu des projecteurs une licence connue pour son aspect run ‘n gun. Sur le papier, les deux genres sont à l’opposé. L’un demande de prendre son temps, de réfléchir, d’anticiper les coups suivants, quand l’autre joue sur l’urgence pour avancer le plus vite possible en tirant sur tout ce qui bouge. Pourtant, les développeurs ont réussi le tour de force de combiner les deux. Cela passe par une idée très simple mais ô combien efficace. Plus un personnage se déplace loin sur la map, plus il engrange de points d’esquive pour limiter les dégâts reçus durant le tour (de l’ennemi) suivant. En somme, contrairement à beaucoup de titres du genre qui misent sur un contrôle de sa zone, Metal Slug Tactics fait tout pour que le joueur déplace ses personnages le plus loin possible. On retrouve donc en substance cette partie « run », même s’il faut se déplacer case par case, chacun son tour. Le niveau joue sur la verticalité pour se placer stratégiquement en fonction des adversaires Bien entendu, la partie « gun » est également assurée. De base, Marco et Fio sont équipés d’armes à feu (une faible à munitions illimitées et une plus puissante à munitions limitées), tandis qu’Eri envoie des explosifs, en plus de son arme secondaire. En sus de ces trois personnages, en terminant le jeu selon diverses conditions, on débloque six autres personnages phares de la série, à savoir Tarma, Trevor, Nadia, Ralf, Clark et Leona. Chacun dispose de son paquetage et de ses compétences, comme Trevor qui peut contrôler mentalement des ennemis. Les parties se déroulent majoritairement de la même manière. Il y a le tour du joueur et celui de l’ennemi (durant lequel on subit). Durant le premier, on peut déplacer chacun de ses personnages avant d’attaquer les ennemis. Parmi les subtilités, on note une certaine verticalité qui permet de se protéger d’une partie des attaques, des systèmes de couverture ajoutant des points de défense (pas toujours de manière cohérente d’ailleurs) et des éléments du décor interactifs pour faire plus de dégâts. On peut actionner une poulie pour décharger sa cargaison sur l’ennemi ou encore faire exploser un tonneau près des adversaires. Il y a même une particularité avec les ennemis qui nous momifient, ces derniers nous permettant de faire bien plus de dégâts au corps à corps sur le tour suivant. Le gameplay est plutôt bien calibré et demande une certaine réflexion… et surtout de l’anticipation. Il est donc nécessaire de bien étudier tous les aspects du jeu, notamment au niveau de l’utilisation des actions spéciales, de l’optimisation de ses points de mouvement ou au niveau des atouts qui ajoutent des bonus non négligeables. Metal Slug oblige, le célèbre tank est également de la partie. Lorsqu’il est ajouté à la mission, il permet de faire de sacrés dégâts. Nous n’allons pas décortiquer chaque élément du gameplay mais il y a une spécificité qui fait tout le sel des parties. C’est la synchronisation. Concrètement, lorsque les alliés sont positionnés de telle sorte à pouvoir toucher un ennemi que l’on cible, ces derniers se synchronisent et déclenchent également leur attaque. Le ou les pauvre(s) adversaire(s) subissent alors deux ou trois assauts. De quoi réduire leur barre de vie à zéro très rapidement, voire en éliminer plusieurs sur un seul tour. Pour aider à visualiser les impacts, en déplaçant la zone d’action, on peut observer si l’attaque va toucher, combien elle va infliger, si une synchronisation va se lancer et combien elle fera de dégâts. À vrai dire, les développeurs ont essayé de rendre le gameplay accessible au plus grand nombre. Malheureusement, s’il y a plein de bonnes intentions, les néophytes seront vite perdus. La faute à un tutorial qui est trop succinct pour s’approprier toutes les notions du jeu. En plus, on sent bien que l’interface a été pensée avant tout pour des joueurs PC. Les textes sont très petits et les fenêtres s’accumulent lorsqu’on veut préciser une notion en cliquant sur le joystick droit. Une fonctionnalité qui se déclenche juste au passage de la souris sur le lien sur un PC. Plus pratique et moins invasif. Comme il y a beaucoup de textes, notamment pour comprendre les effets des compétences ou des atouts, on se retrouve vite gêné ou à s’approcher de son téléviseur, quand on ne plisse pas les yeux. De même, on est parfois confus quand un bouton sert à la validation une partie du temps et que c’est un autre qui prend le relais le reste du temps. Le tank est toujours aussi efficace avec ses attaques qui font de gros dégâts Il faut donc bien une poignée de run avant de commencer à saisir les subtilités du jeu. Comme la difficulté est un peu relevée, même dans le niveau le plus faible, beaucoup de nouveaux venus vont se confronter à la défaite et laisser tomber. Pas dit que tout le monde dépasse le premier boss. Or, rogue-like oblige, on enchaîne jusqu’à trois missions, on déclenche le combat contre le boss et, si on triomphe, on accède à la zone suivante. Avec un peu d’entraînement, on peut finir le jeu rapidement en parcourant deux zones (la première et Sirocco City) ou en tombant sous la barre des 4 heures en faisant le ménage sur les deux autres zones. Bien entendu, si on perd, on repart de zéro ou presque. On garde toutefois les pièces cumulées pour débloquer de nouveaux paquetages et autres mods pour ses armes. C’est donc run après run qu’on optimise son équipe, son équipement, et qu’on peut appréhender de mieux en mieux la suivante. On apprend aussi à plutôt s’orienter vers les missions demandant de tuer tout le monde ou les cibles désignées, voire celles demandant d’atteindre l’arrivée avec une ou deux unités ou celles qui demandent de survivre durant X tours. En revanche, on esquive vite les missions visant à escorter une unité. Le boss est imposant et sa barre de vie est bien plus grande que celle des ennemis plus classiques Le souci, c’est que malgré la génération procédurale des environnements en 3D isométrique, un sentiment de répétitivité survient rapidement. Cela vaut même si les différents personnages apportent des approches différentes, d’autant que les moins habitués au genre risquent de mettre du temps à finir une première fois le jeu. On peste également parfois contre la caméra fixe qui empêche une visibilité optimale lorsque notre personnage passe derrière une structure à niveau. Il est également frustrant de tomber parfois sur une mission dont la difficulté semble bien plus relevée, ce qui met fin précocement à une run. Il n’est pas rare également, dans le feu de l’action, de confondre le personnage sélectionné et donc de lancer une action non souhaitée. Certes, on peut toujours réinitialiser un tour dans une certaine mesure ou profiter d’une résurrection sous certaines conditions, mais cela peut être ennuyant. Côté enrobage, le studio a fait le nécessaire pour accueillir les néophytes comme les fans. Pas besoin de connaître la licence pour se lancer dans le jeu. Par contre, si on l’aime, on découvre beaucoup de fan-service. Le scénario se résume à sa plus simple expression mais on retrouve tous les personnages phares et on profite même de dialogues à débloquer selon certaines conditions. Les musiques sont agréables et les bruitages sont appréciables. L’aspect rétro est très correct même si on a déjà vu plus soigné. En tout cas, on reconnaît bon nombre d’éléments de la franchise et on apprécie le soin apporté aux animations. Conclusion Leikir Studio a fait un étrange pari avec ce spin-off de la licence. En laissant de côté le run ‘n gun pour du RPG tactique au tour par tour, le studio parisien prend un contre-pied inattendu. Force est de constater que le résultat est plutôt à la hauteur, grâce notamment au système s’esquive poussant à se déplacer un maximum et aux synchronisations qui optimisent les dégâts infligés. On retrouve tout l’univers de la licence, pas mal de contenus à débloquer à la sueur de nos pouces, des musiques agréables, plein de clins d’œil et des animations soignées. Le pixel art est plutôt propre et l’ensemble se joue clairement avec plaisir pour un amateur du genre. Néanmoins, plusieurs aspects peuvent être rebutants, à commencer par la gestion des menus, les écritures trop petites et le tutorial qui est bien trop succinct pour permettre à un néophyte de tout comprendre. C’est dommage car bien des efforts ont été faits pour aider les nouveaux venus, avec une belle marge de progression. Reste que l’aspect rogue-like est discutable, surtout quand ce dernier accentue certains aspects redondants des run, et ce, même si les différents personnages, paquetages, compétences et atouts, associés à une génération procédurale, tentent de gommer cela.