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Émulation : qu’est-ce qu’il est ou non permis de faire

Si les émulateurs sont bien pratiques pour jouer aux anciens jeux sur consoles quand ceux-ci ne sont plus disponibles, sur le plan légal, qu’en est-il ? En réalité, cette question est particulièrement complexe.

Entre les lois belges, européennes, américaines et japonaises, la question de la légalité des émulateurs est assez complexe. Et à cela, il faut ajouter que, bien souvent, les ayants droit ont leur mot à dire dans la question, ce qui ne simplifie pas la situation.

Tout d’abord, une petite précision : pour rappel, un émulateur n’est pas une « copie virtuelle » de la console qu’il émule. Son code est particulier et unique et se contente simplement d’avoir pour effet un résultat similaire à celui de la console. Pourquoi cette précision ? Parce que c’est bien souvent cet argument-là qui est utilisé pour justifier la légalité des émulateurs.

D’ailleurs, de manière générale, le problème posé n’est pas tant celui de l’émulateur que celui du jeu qu’il émule. C’est sur cette question que la plupart des ayant droit voulant mettre fin à un émulateur (comme Nintendo avec Yuzu) se basent.

Sur le plan belge, il est extrêmement difficile de trouver des réponses quant à la légalité de l’émulation. Il semble assez clair que la loi belge, elle-même, n’a pas été conçue pour ce genre de cas de figure, et même parmi les avocats vers qui nous nous sommes tournés dans le but de la réalisation de cet article, aucun n’a été en mesure de nous donner une réponse.

On peut néanmoins s’intéresser à ce que dit le droit d’autres pays (comme la France) et comparer ceci avec la loi belge pour voir si des notions similaires existent effectivement.

Or justement, chez nos voisins du sud, on fait souvent valoir un droit pour justifier la légalité des émulateurs : la « copie de sauvegarde » quand ceci est nécessaire pour la préservation du logiciel. Une notion qui, selon certains, semble permettre de justifier la validité des émulateurs d’anciennes consoles.

En Belgique, c’est un peu moins clair, mais le droit stipule que quiconque dispose d’une licence d’utilisation d’un logiciel peut effectuer UNE SEULE copie de sauvegarde de celui-ci, comme l’explique le site du SPF Économie.

Une interprétation un peu généreuse de la loi belge serait donc : si l’on possède une copie physique du jeu, on peut théoriquement disposer d’une copie de sauvegarde virtuelle de celui-ci à utiliser potentiellement sur un émulateur. C’est d’ailleurs une interprétation assez courante de la question en France. Mais attention : mieux vaut rester prudent quant à ce genre d’interprétation…

À ce petit jeu, notons tout de même ce que note le droit français qui parle de préservation du logiciel. Or, bien souvent, le logiciel émulé est disponible ailleurs, même dans le cas de consoles anciennes. Par exemple, la Switch dispose d’un émulateur de Nintendo 64 qui est, quant à lui, fourni par Nintendo sur base d’un abonnement payant à Nintendo Switch Online. Cela rend-il illégal toute autre émulation de jeux Nintendo 64 ?

Et qu’est-ce qui constitue un logiciel ? Si Ocarina of Time sur Nintendo 64 est disponible sur la Switch, cela concerne-t-il également le remake sur Nintendo 3DS ? Ou celui-ci est-il considéré comme un logiciel différent ?

Force est de reconnaître que dans les faits, bien souvent, la question de l’émulation n’est pas tant un problème légal qu’une question d’attitude des ayants droit. Nintendo a ainsi, pendant des années, été plutôt laxiste avec les émulateurs, avant de finalement tomber sur Yuzu, et de tomber sur un accord à l’amiable.

Pourtant, nombreux pensent que Nintendo n’aurait pas gagné de procès contre Yuzu aux États-Unis. Car Sony a déjà essayé de faire interdire des émulateurs PlayStation aux USA, en vain. Puisque le principe de jurisprudence s’applique aux États-Unis avec beaucoup plus de vigueur qu’en Europe, cette décision de justice constitue, de fait, une forme de légalisation de facto des émulateurs outre-Atlantique.

Et c’est là un autre aspect du problème : la législation varie d’un pays à l’autre, et elle est souvent floue. Devant un tel casse-tête juridique, les ayants droit renoncent plutôt à s’essayer à un combat potentiellement perdu d’avance.

Donc pour la question « qu’est-ce qu’il est permis de faire en termes d’émulation ? » la réponse, en dehors d’un haussement d’épaules dubitatif, est plutôt : « mieux vaut se renseigner sur l’attitude des ayants droit. »

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