Connaissiez-vous l’épopée des Légions tchécoslovaques ? Ce pan méconnu de l’histoire de la Première Guerre mondiale nous est sublimement conté par THQ Nordic dans Last Train Home. Explications. Ces dernières années, la Première Guerre mondiale a connu un regain d’intérêt auprès des développeurs de jeu vidéo et des différents studios avec, il faut bien l’admettre, des productions très réussies. On pourrait ainsi mentionner le touchant “Soldats inconnus : mémoires de la Grande Guerre” d’Ubisoft, “Verdun” ou la superproduction “Battlefield 1”, apportant une touche cinématographique aux champs de bataille très réussie. Dernièrement, c’est THQ Nordic qui s’est frotté à la Grande Guerre et à ses tranchées. L’angle ici raconté est relativement méconnu, puisqu’il s’agit de l’histoire des Légions tchécoslovaques. Durant la Première Guerre mondiale, des volontaires tchèques et slovaques, prisonniers de guerre, combattirent aux côtés des forces russes, françaises et italiennes. Après la Révolution russe de 1917 et le retrait du pays de la guerre, il fut décidé que la Légion tchécoslovaque présente en Russie soit envoyée vers la France pour poursuivre les combats. Une évacuation qui devrait alors s’opérer via le Transsibérien, et ce, depuis Vladivostok. Un récit qui prend place durant la guerre, mais qui, paradoxalement, est terriblement poignant. Ces unités, qui ont donné leur vie pour les forces russes, se voient du jour au lendemain abandonnées à leur propre sort, devant se frayer un chemin à travers les plaines hostiles de la Russie bolchevique. Avec un train comme seul moyen de transport, ces soldats doivent batailler pour leur survie, cherchant du charbon pour faire fonctionner le train, de la nourriture pour se sustenter ou encore de la poudre pour créer des munitions. Dans son gameplay, Last Train Home s’apparente énormément à Company of Heroes, mais avec la gestion du train en plus. Vous l’aurez compris, votre devoir, en tant que Major en charge de la sécurité de ce convoi, sera de guider vos hommes vers la liberté et les terres du futur état tchécoslovaque. Bien évidemment, cela ne sera pas simple. La Russie a basculé dans un régime communiste totalitaire très hostile à la présence de la Légion sur ses terres. Ceux aux côtés de qui vous combattiez pendant la Grande Guerre sont désormais vos ennemis. Avec Last Train Home, les développeurs ont eu la malice d’allier habilement différents genres. On retrouve ainsi un aspect stratégie, sur les champs de bataille. À l’instar d’un Company of Heroes (le gameplay est très proche), on se retrouve avec un certain nombre de soldats que l’on doit mener sur le terrain face à des ennemis. Il faudra alors utiliser leurs propres compétences pour progresser, mais également l’environnement afin de se protéger. Concrètement, si vous avez déjà joué à Company of Heroes, vous ne serez absolument pas dépaysés. Quelques éléments diffèrent toutefois. Là où on peut contrôler des unités motorisées dans CoH, Last Train Home ne vous met aux commandes que de fantassins. Chaque escouade peut comporter jusqu’à huit soldats, chacun aux compétences bien particulières : mitrailleur, grenadier, éclaireur… Chaque spécialité permet bien évidemment de se sortir de l’une ou l’autre situation tendue. Un autre aspect qui change par rapport à Company of Heroes est la gestion des différents abris. L’environnement de vos hommes sera leur meilleure protection, et il est important de s’abriter pour éviter des blessures mortelles. Là où le système d’abri est ultra bien calibré dans Company of Heroes, il l’est bien moins dans Last Train Home. Des abris qui semblent pourtant ultra efficaces, comme un véhicule ou l’angle d’une maison sont totalement inutilisables. Vos hommes peuvent s’y abriter, mais ne pourront pas tirer à couvert. Ils devront se déplacer, et donc être plus vulnérables. Vous traversez les champs verts de la Russie en direction de Vladivostok, seule porte de sortie vers le nouvel état tchécoslovaque. Là où la stratégie revêt toute son importance, c’est dans la gestion des hommes et de leurs besoins. Impossible d’assigner toujours la même escouade à des missions sans la fatiguer ou saper son moral. Il faudra ainsi alterner de manière subtile afin de satisfaire les besoins de vos hommes tout en leur permettant de se reposer. Ils auront besoin de repos, mais pas que. Ils devront manger (se contenter d’une demi-ration lorsque la nourriture se fait rare), avoir chaud, être distraits… Autant de facteurs à prendre en compte, mais attention à ne pas sombrer dans l’abus. Offrez de la vodka à vos hommes et ceux-ci deviendront alcooliques, et donc maladroits. Ils se blesseront alors plus souvent, iront plus souvent à l’infirmerie et seront ainsi indisponibles. Mais assigner des hommes à une mission, c’est également leur permettre d’engranger de l’expérience. Tous simples soldats au départ, l’expérience leur permettra de monter en grade, et vous pourrez même les décorer avec une médaille à l’issue d’une mission. Ils pourront ainsi gagner en rapidité, intelligence ou encore charisme, mais également acquérir de nouvelles compétences. Ainsi, un soldat défini comme mitrailleur peut aussi être éclaireur, mais ce n’est pas tout. Au-delà des fonctions combattantes, on retrouve les fonctions du quotidien. C’est là que l’aspect gestion du titre se distingue. Le champ de bataille, c’est une chose, mais le quotidien de vos hommes en est une autre qui est, probablement, bien plus importante. Nous parlions plus haut des différentes ressources. Celles-ci sont cruciales à bien des niveaux. Pour le bon fonctionnement du train notamment. On expliquait ainsi que le charbon permettait au train d’avancer, mais le bois ou le métal vous aideront à améliorer la locomotive, à augmenter sa résistance voire à construire de nouveaux wagons. Nouvelles cales pour accueillir davantage d’hommes, une infirmerie pour les soigner, un entrepôt pour amasser davantage de ressources… Au quotidien, vos hommes partiront donc en mission pour remplir les objectifs, mais pourront également aller chercher du bois dans une forêt, du poisson dans un lac ou encore des métaux près d’une mine ou dans un village. Un système de shift permet également de gérer leur emploi du temps. Une escouade pourra ainsi être assignée aux missions à l’extérieur, tandis qu’une autre pourra s’occuper du bon fonctionnement de la locomotive en fonction d’horaires jour/nuit. Et en plus d’une fonction combattante, un soldat peut également devenir ouvrier ou cuisinier pour le train. L’intérêt est d’améliorer, par exemple, la qualité de la nourriture proposée aux hommes, ou encore d’améliorer l’efficacité de la chaufferie pour consommer moins de charbon tout en continuant d’avancer rapidement. En fait, dans sa partie gestion, Last Train Home tire ses inspirations d’un certain Frostpunk. Vous pourrez améliorer votre train avec de nouvelles cales, avec de meilleurs wagons et de plus fortes résistances. Vous l’aurez compris, le gameplay de Last Train Home nous a énormément plu, et ce, à juste titre. Mais un jeu de guerre n’est réellement bon que s’il propose une direction artistique forte, fidèle aux horreurs des tranchées et des combats. Sur ce point, THQ Nordic semble avoir fait un travail de très grande qualité. L’histoire des légionnaires nous est sublimement contée, au moyen de cinématiques en live-action de grande qualité. En revanche, les cinématiques in-game et courtes sont davantage ratées, la faute à une animation trop primaire pour les unités. Visuellement, le titre n’est pas non plus un exemple de réalisme. Les graphismes sont efficaces avec des villages très jolis et des panoramas autour du train agréables, mais ce n’est clairement pas une nouvelle référence. Disons simplement que ça se laisse regarder. Enfin, la direction artistique soignée l’est également grâce à une ingénieuse bande-son. Au lieu de faire appel à des doubleurs anglophones ou francophones, les ingénieurs du son travaillant sur le jeu ont préféré se fier à des doubleurs parlant des langues slaves, comme le russe, le tchèque ou encore le slovaque. C’est très réussi, et les sous-titres en français nous permettent évidemment de tout comprendre aux dialogues. Conclusion Avec Last Train Home, les équipes de THQ Nordic nous content le récit poignant des Légions tchécoslovaques au travers d’un titre très réussi en bien des points. Si le studio parvient sans peine à une proposer une aventure touchante, capable de nous faire découvrir cette histoire méconnue de la Grande Guerre, c’est notamment grâce à une superbe direction artistique et une narration au poil rythmée par des cinématiques en live action incroyables. Au-delà de l’aspect narratif, le titre nous propose un mix du gameplay de Frostpunk sur la gestion du train et des hommes et de Company of Heroes sur le champ de bataille. On ne s’ennuie à aucun moment face à l’ampleur du travail qui nous attend dans la gestion au quotidien, et les phases de combat sur champ de bataille sont très réussies, à la tête d’une escouade de huit hommes. Si quelques éléments sont perfectibles, comme la gestion des abris ou l’animation des personnages dans les petites cinématiques, nous ne cacherons certainement pas notre joie face à une petite production, certes, mais au contenu dense et qui n’est, ne l’oublions pas, vendue “qu’à 40€”.