Pour une première production, Jukai Studios s’attaque au survival horror avec Stray Souls. Un Alan Wake-like en beaucoup, mais vraiment beaucoup moins bien. Imaginez. Votre grand-mère décède à un âge plus qu’honorable et vous héritez de sa maison. Lors de votre première nuit, vous faites la connaissance d’une étrange voisine sur un site de rencontre qui semble en savoir plus que vous-même sur l’habitation où se produisent d’étranges phénomènes paranormaux. Pour le commun des mortels, la première réaction logique serait de prendre ses jambes à son cou et d’abandonner la maison. Mais Daniel, lui, veut trouver l’origine du mal qui tourmente sa maison et ce qui est réellement arrivé à sa grand-mère. Voici le postulat de départ de Stray Souls, la première production des Polonais de Jukai Studios, une équipe indépendante “fondée par des vétérans de l’industrie qui ont participé au développement de jeux acclamés par la critique avec une spécialisation dans le genre de l’horreur. Leur mission est de susciter la prochaine évolution des médias d’horreur”, explique le site internet. Dans son gameplay et son approche du style du survival-horror, Stray Souls nous fait directement penser à un certain Alan Wake. Vous progressez dans des environnements naturels, sombres et hostiles, peuplés de créatures maléfiques qui veulent votre peau. Équipé d’une lampe torche (inutile ici, si ce n’est pour éclairer) et d’un pistolet à la maniabilité catastrophique, votre personnage se bat pour sa survie. Stray Souls est fort d’une ambiance et d’un univers au poil, bien qu’un peu intrigants par moments. Si nous reviendrons sur le gameplay plus tard, pointons tout de même l’excellente ambiance dans laquelle nous berce le jeu. C’est probablement le seul point fort du jeu, et il est plutôt particulièrement important. Dès le début, avec une cinématique d’introduction forte, dérangeante mais intrigante, Stray Souls pose les bases d’un scénario troublant et d’un univers complètement barré. On ne se sent jamais réellement à l’aise face à cette ambiance empreinte de satanisme et d’horreur. Toutefois, en ayant voulu faire peur aux joueurs, les développeurs ont peut-être poussé le curseur des jumpscares un peu trop loin. Ils en ont clairement abusé, certains devenant même prévisibles et risibles. On est donc bercés dans cet environnement stressant, même s’il nous arrive de rigoler face au non-sens de certains détails. Une ambiance excellente donc, aidée par des compositions musicales réalisées par Monsieur Akira Yamaoka, compositeur de légende des Silent Hill. Et pour cause, tout au long de notre aventure, nous avons été subjugués par la justesse et la qualité des mélodies. En revanche, le titre n’est aucunement doublé en français, nous laissant avec de tristes sous-titres en français… Le level-design est catastrophique. Prenons en exemple le passage vers le cimetière lorsqu’on se retrouve seul dans un bois face à ces drôles de créature. Si l’on excepte le fait qu’on ne voit rien à plus de trois mètres, la construction du bois est totalement ratée. On erre pendant plus d’une dizaine de minutes sans trop savoir vers où, dans des niveaux qui donnent l’impression d’être totalement ouverts et qui se ressemblent tous les uns les autres. C’est le cas également pour les cinématiques. Celles-ci traînent inutilement en longueur, avec des dialogues à rallonge qui n’ont que peu d’intérêt alors que ça pourrait aller plus vite et aider à accélérer le rythme. La maniabilité du pistolet et de notre héros, Daniel. Niveau gameplay, Stray Souls nous met donc dans la peau de Daniel, armé d’un pistolet pour se défendre contre les étranges créatures qui pourraient vous en vouloir. Impossible pour le jeune homme, qui fête ses dix-huit ans durant l’aventure, de se défendre avec un coup de pied ou autre, les seuls gestes qu’il puisse faire étant une roulade par esquive ou courir. Honnêtement, rien de positif n’est à souligner dans le gameplay. Les déplacement de Daniel sont très lourds et ultra désagréables. Absolument pas fluides, ils sont très compliqués à coordonner lorsqu’il faut éviter les attaques d’un ennemi ou d’un boss. Le pire est probablement le dégainement de l’arme, qui ne peut se faire qu’en effectuant une combinaison de touches. On oublie ainsi régulièrement de dégainer avant de commencer à viser, nous rendant alors totalement vulnérable pour l’ennemi. Les hitboxes sont également hasardeuses, puisque même si l’on tire à côté d’un ennemi, celui-ci est touché… Nous évoquions justement les boss. Ceux-ci sont totalement dépourvus d’intérêt. À l’instar d’un gros méchant des plus banals, il suffit juste de les éviter et d’enchaîner les coups de feu dans leur direction. Ils disposent tout simplement d’une barre de vie plus conséquente que les plus petits ennemis, mais c’est tout. Leur pattern de coups est totalement vide, se contentant de foncer vers nous et de nous attaquer. Notre seule mission étant alors d’éviter puis de tirer sur ces ennemis vides de sens. Visuellement certains panoramas et décors sont franchement réussis. Vide, c’est l’adjectif que nous utiliserons pour définir Stray Souls. Les nombreuses énigmes mises sur notre route sont assez bien cherchées, quoique souvent tirées par les cheveux et sans logique. Elles sont mêmes en anglais, ce qui n’est pas toujours évident pour ceux qui ne maîtrisent pas la langue de Shakespeare. D’ailleurs, le jeu est entièrement en anglais, avec du sous-titrage en français. C’est bien simple, la production de Jukai a plutôt des allures de démo ou de jeu en accès anticipé plutôt qu’un titre fini et commercialisé. Vendu tout de même 30€ au prix plein, il ne se boucle qu’en moins de cinq heures et est parsemé de bugs en tous genres troublant terriblement l’immersion. Personnages qui sautillent en pleine cinématique, problème de caméra qui tremble dans les lieux exigus… Un vrai gros patch de la part des développeurs venant corriger ces bugs est plus que bienvenu, même si l’on doute qu’il existe un jour. Visuellement, enfin, Stray Souls obtient une mention honorable. Grâce à l’Unreal Engine 5 et la technologie MetaHuman d’Epic qui offre des visages et animations faciales de qualité, Stray Souls est honnêtement très réussi à ce niveau. S’il y a toujours mieux ailleurs, pour une petite production indépendante, le jeu de Jukai Studios fait un (quasi) sans-faute à ce niveau. Conclusion En voulant révolutionner le genre du survival horror, comme ont pourtant su le faire tellement d’autres jeux avant lui, Jukai Studios se vautre totalement. Plein de bonnes intentions, Stray Souls est raté en bien des points. Malgré une ambiance, des visuels et une bande-son très réussis, Stray Souls donne plutôt l’impression d’être un titre en cours de développement, comme une démo, plutôt qu’un jeu complet commercialisé. Rempli de bugs que ce soit lors des cinématiques ou lors des phases de jeu, Stray Souls abuse des jumpscares dans les moments creux. Même les passages plus rythmés sont troublés par des cinématiques qui tirent en longueur et qui cassent irrémédiablement le rythme que tentent (très rarement malgré tout) d’imposer les développeurs. En revanche, nous n’avons rien eu à reprocher à la bande sonore du titre, composée par le légendaire artiste ayant travaillé sur Silent Hill, et apportant énormément à l’ambiance du titre. Vendu 30€ et fini en moins de cinq heures, Stray Souls est un survival horror qui manque cruellement d’ambition dans son gameplay et peine à convaincre à tous les niveaux.