L’entreprise révolutionne régulièrement le commerce en ligne. Mais dans la gestion de la masse salariale, en revanche, les méthodes sont pour le moins surprenantes. Un site d’Amazon en Allemagne. (Uwe Zucchi/EPA/Keystone) Un village de vacances de la région de Hesse, dans l’ouest de l’Allemagne, hébergeant des travailleurs étrangers qui touchent des salaires inférieurs à ceux qui leur avaient été promis. Notamment des Espagnols qui ont quitté leur pays frappé par la crise pour travailler en Allemagne. L’endroit est encadré par des vigiles en uniformes noirs portant des vêtements de la marque Thor Steinar, très prisée dans les milieux d’extrême droite. Ils sont aussi chaussés de bottes militaires. On dirait un film de mauvais goût? Et pourtant, tout est bien vrai, et la découverte de ce décor genre IIIe Reich sur le retour a poussé ce week-end la ministre allemande du Travail, Ursula von der Leyen, à prendre le taureau par les cornes dans le journal Die Welt am Sonntag. En souvenir de Rudolf Hess Mais de quoi s’agit-il? De rien de moins que les conditions de travail des employés saisonniers du géant d’Internet Amazon. Une émission de télévision vient de dénoncer ces pratiques discriminatoires. Le reportage de la chaîne ARD affirmait qu’Amazon avait recours à une société de sécurité pour surveiller certains de ses salariés. Mais surtout que cette agence, H.E.S.S. Security, employait des néonazis – son nom faisant probablement référence au charmant et influent compagnon de Hitler Rudolf Hess. Si le distributeur en ligne, contre lequel les appels au boycott se multiplient maintenant en Allemagne, selon Bild, a rejeté vendredi ces accusations, la ministre dit tout de même «vouloir examiner les faits attentivement». Elle déclare que «si l’enquête montre que ces accusations sont vraies, l’agence de placement qui a embauché ces travailleurs pourrait perdre sa licence». Slate.fr donne les détails de cette sordide histoire: «Les employés immigrés, souvent embauchés par des agences extérieures, note The Verge, ont été malmenés.» Des exemples? «Les gardes pénètrent régulièrement dans leurs chambres, prétendument pour vérifier que les employés ne volent pas les petits pains des petits déjeuners.» «Comme la police» «Ils nous ont dit qu’ils étaient comme la police ici»: le témoignage d’une employée espagnole montre bien la volonté d’intimider des employés recrutés à bon marché. «Ils vont dans les maisons quand les gens ne sont pas là, ajoute une autre, dont les propos sont rapportés par le site EuObserver. Et aussi quand ils sont là, en train de dormir ou de prendre une douche.» Une autre employée indique à l’Independent britannique qu’elle a été chassée du chalet qu’elle partageait avec cinq autres personnes «pour avoir fait sécher ses vêtements sur un radiateur mural». Du coup, même le site ActuaLitté y va de son propre décryptage: «Recherche agent de sécurité, crâne rasé et bottes en cuir demandées. Ratonnade à prévoir, sang impur s’abstenir»: bientôt de telles annonces de recherche d’emploi dans les bases de données d’Amazon? Le poste que la firme a confié à plusieurs cerbères […] s’apparente en tout cas à des menaces pures et dures: ces «gardiens» seraient chargés de motiver la main-d’œuvre, surtout d’origine étrangère, à l’aide d’intimidations en tout genre.» Réagissez sur le forum. Article écrit par Olivier Perrin sur LeTemps.ch.