Durex: le tweet de la honte

La marque de préservatifs a provoqué un tollé en Afrique du Sud en diffusant une blague tournant autour du viol.

Il y a toujours une blague de trop. La plaisanterie que l’on n’aurait pas du prononcer. Une occasion perdue de se taire. Cela vient d’arriver à la marque de préservatifs Durex sur son compte twitter sud-africain. La marque de préservatifs réputée pour ses pubs humoristiques s’est égarée sur le terrain du viol. Le 24 novembre, voici ce que la tweetosphère pouvait lire sur le compte Durex South Africa :

« Why did God give men penises ? So they’d have at least one way to shut a woman up. #DurexJoke »

Une référence claire au viol. Il n’en fallait pas plus pour susciter la controverse en Afrique du Sud. Ce dérapage a provoqué une levée de boucliers dans les milieux féministes. L’une d’entre elles a demandé des explications à la marque de préservatifs. Durex donnait alors une réponse qui laisse penser qu’elle n’a pas mesuré la portée litigieuse de son tweet :

“@FeministsSA We have posted many jokes, see our timeline… And they not violent against woman! Re-read it!!!!!”

Des excuses en pagailles

Très vite, le tweet fait un buzz en Afrique du Sud. Non pas parce qu’il fait rire, mais parce qu’il choque. Les messages consternés s’enchaînent sur le compte #DurexSA. Le tweet litigieux est rapidement supprimé. Les excuses arrivent dans le courant du lendemain via un autre tweet.

“We’re really sorry for causing offense today, not intentional. We believe in the rights of woman and safe sex. Thanks for putting us right. As a brand respected by millions, we would like to take this opportunity to apologize for the jokes posted on our timeline yesterday #DurexApology ”

Un autre tweet est directement adressé au compte FeministsSA:

Ces messages servent le temps de modifier la page d’accueil du compte. La faute est rejetée sur l’agence de communication de Durex : EuroRSCG responsable du compte Twitter. Durex affirme son attachement au respect des Hommes et des Femmes à avoir une vie sexuelle saine et affirme que les propos tenus dans le tweet #Durexjoke étaient « inappropriés ». Voilà, pour l’exercice de communication. L’incident est officiellement clos.

Le viol, un fléau de l’Afrique du Sud
« Des propos inappropriés ». C’est le moins que l’on puisse dire. Le viol est une affaire hautement sensible en Afrique du Sud. On y compte environ 500 000 viols par an et l’Organisation Mondiale de la Santé s’autorise à dire qu’il s’agit d’un des facteurs les plus importants de la propagation du SIDA en Afrique du Sud.

À cela, s’ajoute le fait que la plupart des femmes violées sont lesbiennes. Un élément qui accroît la sensibilité du sujet chez les Sud Africains. Le viol n’est pas qu’une question de crime, c’est aussi une question d’homophobie. Lorsqu’une homosexuelle est violée en Afrique du Sud, beaucoup parlent alors de « viol correctif ». Des hommes obligent des lesbiennes à avoir des relations sexuelles avec eux, jugeant que cela permettra à celles-ci d’être remises “dans le droit chemin”. Le 24 avril 2011, le viol et le meurtre de Noxolo Nogwaza dans les bas quartiers de Johanesburg provoquait une vive émotion. Noxolo Nogwaza était lesbienne et militante pour les droits des homosexuels en Afrique du Sud.

Suite à ce crime, Human Right Watch affirmait avec lassitude que Noxolo Nogwaza allongeait une liste déjà bien longue de lesbiennes violées et assassinées en Afrique du Sud. Le collectif Avaaz a lancé une pétition qui frôle le million de signatures pour mettre fin à ces viols correctifs et encourager le gouvernement de Jacob Zuma à ne plus fermer les yeux face à ce problème.

Sujet grave et lourd, en lien direct l’homophobie, le viol est un sujet avec lequel on ne plaisante pas en Afrique du Sud. Durex l’a appris à ses dépens.

Rémi Declerck (St.)

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