“Google est un ami qui ne vous veut pas que du bien”

Google, dont les négociations avec les éditeurs de presse français sur le paiement de droits dits “voisins” arrivaient jeudi à leur terme, est “un ami qui ne vous veut pas que du bien”, selon l’économiste Pascal Perri qui sort un livre sur le sujet jeudi.

© AFP

QUESTION : Quel est le prix à payer pour avoir accès à un service gratuit comme Google ?

PASCAL PERRI : “En économie, le gratuit n’existe pas. L’ambition était d’essayer de comprendre le modèle technique et économique d’une entreprise que nous fréquentons chaque jour et qui est entrée dans notre intimité. Je décris Google comme notre meilleur ami. J’échange avec cet outil mes questions sur le savoir du monde, mes données de localisation, des adresses…C’est un registre extrêmement large et j’ai voulu savoir comment fonctionnait ce modèle et quel était le prix à payer. Je me suis aperçu que le prix à payer était de se dénuder devant notre meilleur ami pour tout lui dire de ce que nous sommes, nos habitudes de consommation, nos goûts, nos relations. C’est sur la base de ces informations que nous lui livrons que Google, qui est une immense agence de publicité, se rémunère”.

Q: Selon vous, la valeur, entre les créateurs de contenus (musique, films, presse…) et Google, est-elle justement répartie et que pensez-vous des négociations qui avaient lieu entre le moteur de recherche et les éditeurs de presse français ?

R: “Mettons fin à mythe. Google n’est pas un robinet, c’est un filtre qui laisse passer les informations en fonction de contingences économiques. S’agissant de la presse, Google utilise la production de contenus des éditeurs de presse sans la rémunérer. On sait que le modèle économique de la presse est en difficulté et que c’est une matière particulière qu’il faut protéger car l’information n’est pas un bien marchand. En mettant en cause un modèle économique qui est déjà en péril, Google nous fait courir à tous un risque considérable en matière de liberté publique. Et puis, il y a la simple logique économique : on ne peut pas s’approprier le bien d’autrui pour l’utiliser, le valoriser sans le rémunérer. Google avance avec la politique du fait accompli : Le territoire conquis ne se discute plus, on parle de ce qu’il y a devant. Google accepte de s’asseoir à la table des négociations mais négocie à minima”.

Q : Que voulez-vous dire quand vous écrivez “quand on possède un tel pouvoir, la tentation est grande de s’en servir à son avantage” ?

R: “Google c’est 97% de la recherche en France. On est dans une situation de quasi monopole. Google a le monopole de l’accès au consommateur final. Il exerce, d’une certaine façon, une forme de droit de cuissage économique à l’égard de tous ceux qui veulent parler aux consommateurs. C’est une situation de chantage. Les gens n’ont pas conscience de cela. C’est leur liberté et le respect de la vie privée qui est en jeu”.

Pascal Parri: “Google, un ami qui ne vous veut pas que du bien”, Editions Anne Carrière,175 pages.

AFP

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